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Au Nigeria, ce 1ᵉʳ août 2024, des milliers de personnes sont descendues dans les rues dans le cadre de #Endbadgovernance (« Mettre fin à la mauvaise gouvernance »), un mouvement pour exiger des meilleures conditions de vie. Le mouvement #Endbadgovernance a bien démarré jeudi matin. Un test grandeur nature pour les autorités nigérianes, presque quatre ans après le mouvement #EndSars qui s’était terminé avec la mort de manifestants à la suite de tirs d’hommes en uniforme sur le péage de Lekki à Lagos.

Malgré les appels contre ce mouvement lancés depuis des semaines par la majorité présidentielle, les Nigérianes et Nigérians sont descendus en nombre dans les rues, et ce, dans les six zones géographiques. Plusieurs milliers de manifestants ont convergé dans les principales villes du Nigeria pour exiger des meilleures conditions de vie.

À Abuja, des manifestants ont marché vers Asokoro avant de s’arrêter à quelques encablures à vol d’oiseau de la villa présidentielle, de l’Assemblée Nationale et de la Cour suprême. Les forces de sécurité sont obligées de tirer du gaz lacrymogène pour disperser un cortège composé majoritairement de jeunes peu rompus à l’exercice de manifester. C’est l’une des images fortes à retenir de cette première journée du mouvement #Endbadgovernance.

Sans surprise, Lagos et Abuja ont connu les affluences les importantes. Néanmoins, au nord où d’habitude la population participent rarement à des manifestations citoyennes, Kano, Maiduguri, Bauchi ont vu des dizaines milliers d’adolescents et des hommes d’âge mûr, mais aussi des femmes manifester. Des dizaines de jeunes manifestants perchés sur des panneaux publicitaires surplombaient une foule de plusieurs centaines de personnes en agitant des branches d’arbres ou des pancartes en face du palais du gouverneur de l’État de Gombe. Des scènes identiques dans les États de Kano, Borno et de Bauchi, toujours dans le nord du Nigeria. Des cortèges défilant et chantant des slogans dans l’État de Benue au Centre, dans le sud-ouest dans l’État d’Oyo, et aussi à Port Harcourt dans l’État de Rivers. Une confirmation que le mouvement #EndbadGovernance a une dimension nationale.

Partout les cortèges étaient encadrés par une forte présence policière. Si dans l’ensemble les marches étaient pacifiques, quelques mouvements désordonnés de foule ont provoqué des tensions, aboutissant à des actes de répression de la part des forces de l’ordre et à l’arrestation de plusieurs dizaines de manifestants.

C’est toutefois à Lagos qu’on peut observer le cortège le plus important. Plusieurs milliers de manifestants ont convergé à Ikeja, sur la partie continentale de la capitale économique du Nigeria.

Un mouvement sans leaders proclamés

Pour le moment, le mouvement #Endbadgovernance n’a pas de leaders proclamés. Donc, il y a peu de coordination de cortèges et beaucoup d’improvisation encore, car la majorité des manifestants ont moins de 20 ans. Pour beaucoup d’entre eux, ce sont d’ailleurs aujourd’hui leurs premiers pas dans une manifestation organisée.

Plusieurs coalitions d’organisations de la société civile s’activent un peu partout pour aider à la structuration d’un mouvement né sur les réseaux sociaux. Parmi ces coalitions, on compte quelques figures ayant lutté pour le retour de la démocratie dans les années 1990 et aussi des militants des mouvements Occupy Nigeria de 2012.

Enfin, Peter Obi, du Parti travailliste et figure de l’opposition, demande au gouvernement d’écouter les doléances des manifestants. Dans le même temps, il souhaite que les personnes participant à ce mouvement #EndbadGovernance respectent la loi en demeurant non violentes.

« Les ménages n’ont pas de quoi tenir »

La mobilisation des Nigérians n’a en rien surpris Taiwo Otitolaye. Militant des droits civiques depuis plus de 40 ans, cet activiste comprend les racines de cette colère. « Les citoyens sont sortis parce qu’il y a une faim extrême et une pauvreté abjecte dans le pays. Les ménages n’ont pas de quoi tenir. Les familles retirent leurs enfants de l’école. Le premier jour de ce mouvement est donc une bonne chose ».

Dans les années 1990, Taiwo Otitolaye s’est confronté aux différentes dictatures militaires nigérianes et pour lui, la stratégie actuelle d’invisibiliser la tête du mouvement #Endbadgovernance est la bonne. « Pendant les manifestations, en ce temps-là, on voyait les militaires venir à la tête des cortèges pour s’assurer que les activités étaient paralysées. Mais cette fois-ci, on constate que diverses coalitions et groupes agissent en collectif dans le but de mettre fin à la mauvaise gouvernance ».

Compagnon de lutte de Beko Ransome-Kuti, leader à l’époque de la campagne pour la démocratie, Taiwo Otitolaye espère une chose. Que le mouvement #EndbadGovernance sache éviter les obstacles et les pièges sur son chemin.

RFI Avec notre envoyé spécial à Port Harcourt, Moïse Gomis

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