La coalition “Samm sa Kaddu”, à travers sa commission communication, s’est prononcée sur l’opération de levée de fonds (181 milliards de francs CFA) menée par l’État du Sénégal sur le marché financier international pour couvrir des besoins de financement dans le cadre de l’exécution budgétaire de l’année 2024.
Il est heureux, qu’en cette période de campagne électorale pour les législatives du 17 novembre 2024, qu’une certaine opposition sorte des sentiers battus de l’invective et de la violence pour challenger le pouvoir sur des sujets d’intérêt majeur, comme la gestion des finances publiques, entre autres.
Toutefois, l’analyse du contenu du communiqué laisse pantois et révèle un médiocre niveau de maitrise des enjeux surtout de la part d’une opposition dont certaines figures sont des députés sortant de l’Assemblée Nationale dissoute qui prétendent disposer des aptitudes professionnelles (parcours et discours) pour diriger le Sénégal.
En effet, le communiqué, faute de pouvoir distinguer les « opérations budgétaires » des « opérations de trésorerie » est un charabia inaudible, traitant, tutti quanti, de tout et de rien…Hélas !
Pour la bonne compréhension de cette opération, il est utile de rappeler qu’à l’issue du marathon budgétaire 2023, le dernier budget du président Macky Sall a été adopté à travers la loi n°2023-18 du 15 décembre 2023 portant loi de finances pour l’année 2024. L’article 12 de cette loi, relatif à l’équilibre budgétaire et financier, précise en son « point I » que « pour l’année 2024, les prévisions de ressources et les plafonds des charges de l’État, évalués dans les précédents articles et le déficit qui en résulte, sont fixés aux montants indiqués dans le tableau ci-après ». Autrement dit, en l’absence d’une loi de finances rectificative, le nouveau régime ne peut endetter le Sénégal d’un franc supplémentaire et, ce jusqu’à l’adoption d’une nouvelle loi de finances. Dès lors, la levée de fonds de 181 milliards de francs CFA sur le marché financier international n’est pas une opération budgétaire qui accroit l’endettement du Sénégal.
Cette levée de fonds procède d’une opération de trésorerie pour couvrir des besoins de financement dans le cadre de l’exécution budgétaire de l’année 2024. En effet, le « point II » de l’article 12 la loi de finances pour l’année 2024 dispose « pour l’année 2024, le Ministre chargé des Finances est autorisé à contracter des emprunts, à recevoir des dons au nom de l’État du Sénégal et à lever des ressources de trésorerie pour un montant total de 2, 442 milliards de FCFA. Ces opérations de trésorerie pourront être contractées soit sur le marché national, soit sur le marché extérieur auprès de pays ou organismes étrangers et auprès d’organismes internationaux, à des conditions fixées par décret ou par convention ».
A la lumière de ces précisions, le communiqué sur les finances publiques de « Samm Sa Kaddu » est un projecteur, grandeur nature, sur le niveau d’ignorance et/ou de mauvaise foi de ses auteurs.
On n’exige pas des acteurs politiques une maitrise pointue des questions budgétaires, financières et fiscales qui structurent la définition et la conduite des politiques publiques mais on ne peut leurs tolérer un discours lacunaire sur ces sujets. Ne pas savoir est une lacune excusable mais se prononcer en « toute ignorance de cause » est une faute impardonnable.
L’incapacité à faire le départ entre une opération budgétaire et une opération de trésorerie révèle une forme de vacuité profonde d’un aspirant à des responsabilités étatiques, principalement chez le député ayant voté la loi de finances. Pour cette raison, il ne mérite pas le renouvellement de son mandat.
Elimane POUYE, Citoyen sénégalais