Décidément tous les moyens sont bons pour prendre son pied, s’évader de l’étreinte de la pression sociale et oublier les tracasseries quotidiennes. Après le «Souss » et le « volet » place à la Vody vodka ! C’est la nouvelle boisson « magique » qui fait dangereusement planer les sénégalais, particulièrement les jeunes, en quête de sensations fortes. Comme son nom l’indique, la Vody Vodka mixt energy est un mélange explosif entre une boisson énergisante et de la vodka (alcool entre 35 et 40 degré.) Attention, abus très dangereux pour la santé. Les autorités sénégalaises doivent incessamment fermer le robinet afin d’éviter que le marché local soit inondé, et les consommateurs foudroyés par des complications cardiovasculaires.
Commençons par la composition de cette boisson particulière. La « Vody » qui est principalement fabriquée en Allemagne. Un mélange de deux ingrédients principaux : la vodka, qui représente près de 18% du volume total, et des boissons énergisantes contenant de la caféine, de la taurine et du glucuronolactone, occupant le reste. Pour donner une couleur et un goût attrayants, des colorants et des arômes artificiels sont également ajoutés à la préparation. Un mélange explosif ! La teneur en alcool de la « Vody » se situe généralement entre 12% et 18% en volume. Quant à la concentration en caféine, elle peut varier de 80 à 150 milligrammes par canette de 250 ml, moyennant 700 à 1.000 fcfa l’unité. Un prix accessible, donc à la portée des jeunes consommateurs…
Les effets de cette combinaison potentiellement mortelle sont particulièrement préoccupants chez les adolescents. En effet, l’association de l’alcool et des stimulants à base de caféine peut entraîner des risques accrus d’intoxication éthylique voire de problèmes cardiovasculaires sans oublier les troubles du comportement. Pourtant, aucune restriction à la commercialisation et à la consommation de la « Vody » ne semble avoir été prise pour le moment. La nouvelle trouvaille des ado fait fureur à Dakar ! Le produit est tellement prisé qu’il est devenu très difficile de se procurer une canette fraîche. Une rupture de stock est constatée au niveau de la plus part des points de vente.
Au-delà du Sénégal, il est intéressant de noter que la vente de ladite boisson alcoolisée, fait également polémique dans beaucoup de pays, depuis plusieurs années. Par exemple, en Côte d’Ivoire, la Vody a été à l’origine de plusieurs conflits entre les représentants de la marque, les services étatiques et certains commerçants. Selon le site pressecotedivoire.ci, en janvier 2020, les autorités ivoiriennes avaient pris des mesures pour interdire la vente de ce produit sur l’ensemble du territoire national. Cependant, malgré ces efforts, une nouvelle vague de boissons alcoolisées à base de vodka semble avoir fait son apparition sur le marché ivoirien.
Les informations fournies par le site internet officiel de la Douanes sénégalaise, l’importation d’alcools, de boissons gazeuses, de liqueurs et autres boissons alcoolisées est soumise à des réglementations spécifiques. Tout importateur de ces produits doit obtenir une autorisation du Ministre en charge des finances. De plus, les boissons alcoolisées importées sont assujetties à des taxes intérieures, à l’exception de celles qui en sont exonérées. Il y’a donc un contrôle qui est exercé sur ce type de produit. Tout ça pour dire que l’État du Sénégal est censé être au courant de l’introduction et de la commercialisation de la « Vody » sur le marché local.
L’importation de boissons alcoolisées au Sénégal, est bel et bien encadrée par la loi. La Direction du Commerce Intérieur, plus précisément sa Division de la Consommation et de la Qualité, est normalement chargée de contrôler la qualité des produits alimentaires importés, y compris les boissons alcoolisées. Cette division reçoit les déclarations d’importation de produits alimentaires (DIPA) et délivre l’autorisation de mise à la vente. Cependant, on peut s’interroger sur l’application effective de ces réglementations, notamment concernant les circuits de distribution de ces boissons alcoolisées. Est-ce le même procédé qui est utilisé ? Ou bien existe-t-il une autre structure en charge du contrôle de ce type de produit ?
En outre, au Sénégal, la réglementation prévoit que tout exploitant de débit de boissons doit disposer d’une autorisation administrative (préfet et gouverneur.) Pourtant, dans certains quartiers de Dakar, on peut se procurer ce type de boissons alcoolisées avec une facilitée déconcertante. La plupart du temps dans des établissements publics ou privés qui ne disposent pas toujours des agréments prévus a cet effet. Face à un contrôle qui n’est pas forcément assidu encore moins rigoureux de la part des services de l’État, chacun se lance dans ce business très fructueux, au prix de la dégradation de la santé publique.
Enfin, s’agissant des boissons dites « énergisantes », il ne semble pas exister de réglementation spécifique sur leur importation au Sénégal. Cependant, ces produits restent soumis aux réglementations générales en matière de sécurité alimentaire et d’étiquetage applicables à l’ensemble des denrées alimentaires importées. Les autorités sanitaires conservent ainsi la possibilité d’effectuer des contrôles et de prendre des mesures restrictives si des problèmes sont constatés sur la composition ou la conformité de ces boissons. En l’espèce, il est primordial de dire stop avant que la situation ne soit incontrôlable.
En attendant, la jeunesse sénégalaise continue d’être exposée à la Vody et ses conséquences qui peuvent être dévastatrices. Face à l’urgence de la situation, les associations de protection des consommateurs et de prévention des addictions devraient aussi monter au créneau et inciter les autorités à agir rapidement. À l’heure où les jeunes font face à de nombreux défis (quête d’emplois, chômage excessif etc), la commercialisation incontrôlée de la cette boisson alcoolisée ne fait qu’ajouter un problème de plus à la longue liste déjà existante.
Les pouvoirs publics se doivent de réagir promptement pour protéger une génération déjà fragilisée par la crise économique et sociale. L’avenir du Sénégal en dépend. Il est plus qu’urgent que l’Etat, à travers ses services compétents, se penche un peu plus sur l’importation et la commercialisation de ces types de breuvages et autres produits nocifs pour les consommateurs.
Mouhamadou Moustapha GAYE